Le livre "Le Lin, fibre de civilisation(s)", présenté lors d’une table ronde au Mobilier National

06 décembre 2023

  • Lin

Alliance for European Flax-Linen & Hemp a été l’invitée d'une table ronde au Mobilier National le 23 novembre 2023. Retour sur cet événement qui a permis de célébrer le lin.

Le Lin, fibre de civilisation(s) - Mobilier National

Organisée dans la lignée de la parution du livre, Le lin, fibre de civilisation(s) en octobre 2023, l’objectif de cette table ronde au Mobilier National était de transmettre au public la dimension créative du lin, ses propriétés fonctionnelles uniques et plus généralement ses nombreux autres aspects grâce aux interventions d’experts, connaisseurs et utilisateurs de cette fibre singulière. L’opportunité de parler de cette matière qu’est la fibre de lin, que l’on croit connaître mais qui révèle pourtant de nombreuses surprises.

Les invités du Lin au Mobilier National

Parmi les invités de la table ronde était présent Alain Camilleri, directeur de publication de l’ouvrage, consultant et médiateur culturel sur le lin, qui a décrypté l'histoire du lin, son intimité et sa permanence dans nos cultures, passées et contemporaines. François Azambourg, designer français de renom et pionnier dans l'utilisation du lin pour le design et le mobilier était également invité, de même que Marisol Santana et Emily Chakthakynski, designeuses finalistes de la Design Parade – Toulon 2023 qui se sont exprimées sur le lin dans leur travail. Enfin, Marie-Emmanuelle Belzung, Déléguée générale de Alliance for European Flax-Linen & Hemp, a pris la parole pour présenter les enjeux de la filière Lin : à savoir, son développement et son avenir.

Marc Bayard, Conseiller au développement culturel et scientifique au Mobilier national, n’a pas manqué de rappeler qu’on retrouvait le lin, par exemple sur l’envers des tapis "de Savonnerie", joyaux de la grande tradition tapissière française. Selon lui, le lin ne représente pas seulement un simple matériau mais une tradition profondément ancrée en nous sans qu’on s’en rende compte, dans notre histoire et aussi dans nos pratiques culturelles. Il a notamment expliqué que ce qui l'intéressait particulièrement avec le lin, c'était le renouveau de sa filière, exemplaire par le travail des hommes et des femmes qui la font vivre. A ses yeux, elle est un modèle en termes de réindustrialisation, d’expansion de la production et de l’ensemble des savoirs et chaînes de savoir-faire.

Ouvrant les échanges, Alain Camilleri est revenu sur le genre du livre : une anthologie, c'est-à-dire une succession de morceaux choisis. Le choix de cette catégorie littéraire permet au livre de raconter le lin sous la forme d’une saga et non simplement d’un récit chronologique. Ce choix a également permis d’accueillir les témoignages des trente-sept collaborateurs extérieurs qui se sont exprimés sur le lin, allant de l'archéobotaniste du CNRS jusqu'aux scientifiques d'Arvalis afin de nourrir le propos de leurs nombreuses connaissances.

La saga du lin contée par Alain Camilleri

Alain Camilleri a relaté la construction du livre autour de deux mots phares : Permanence et Intimité. Des mots qui résonnent car le lin s’inscrit parmi les fibres les plus anciennes utilisées et développées par l'humanité. L’intimité parce qu’on l'ignore peut-être mais « lin » a donné le mot linge ou encore le mot « ligne », qui fait référence à la longueur de la fibre de lin dans notre vocabulaire, comme l’a confirmé une étymologiste ayant collaboré sur l’ouvrage. Alain Camilleri a également déclaré que le domaine qui caractérisait certainement le lin en tant que fibre unique était le Sacré. Parce qu’au-delà de sa richesse historique, le lin est aussi une fibre qui se porte à même le corps. Ainsi, il a détaillé une photo du Suaire de Turin, rappelant sa composition en lin et toute la symbolique que cette archive représente dans la religion catholique.
Le lin est présent dans les textes sacrés : le Livre de l’Exode, la Torah et les Manuscrits de la Mer Morte. Plus spécifiquement, le Chaatnez dans la Torah interdit de porter un tissu qui mélange fibre animale et fibre végétale. Enfin, il s’est exprimé sur la Colobium Sindonis, sorte de chasuble de lin blanc, revêtue par les monarques britanniques lors de leur couronnement. Une tradition perpétrée par Elizabeth II, puis récemment par son fils le roi Charles III au moment de recevoir l’onction en l’Abbaye de Westminster le 6 mai 2023.

Ne tarissant pas de faits historiques sur le lin et passant en revue de nombreux sujets du livre, Alain Camilleri a mentionné les origines de cette plante qui proviendrait du Moyen-Orient et qui en agronomie serait un marqueur de sédentarisation pour l’Homme.

Comme l’a rappelé Igor Robinet, animateur de cette table ronde, le lin, grâce à ses qualités et ses propriétés intrinsèques, mais aussi par le jeu de la recherche et des technologies, est aussi une fibre de haute performance qui a su s'adapter et qui s'adapte encore pour répondre aux enjeux durables. Dans ce sens, le lin européen certifié European Flax™ correspond à une garantie d'origine et de traçabilité de fibres produites et cultivées en Europe de l’Ouest, en France, en Belgique et aux Pays-Bas. Cette fibre végétale de qualité premium, véritable réponse aux attentes des consommateurs et aux exigences de RSE, est issue d'une production respectueuse de l'environnement avec notamment une culture en rotation raisonnée sans OGM, sans défoliant, sans irrigation, avec un rouissage à terre ainsi qu’une extraction 100% mécanique et zéro déchet.

Le Lin mise sur tous les talents

Lors de sa prise de parole, Marie-Emmanuelle Belzung, a abordé l'identité culturelle du lin ainsi que l'innovation technique et la durabilité associées au lin. D’où l'importance de capitaliser sur les talents et l’intérêt de cette fibre aux propriétés uniques avérées à travers la dimension innovante et créative, sans oublier les valeurs humaines et la notion de développement durable associées au lin. Elle a également expliqué la nécessité de renforcer l’utilisation de cette fibre dans l'industrie contemporaine en soulignant les efforts de l’Alliance pour valoriser les forces du lin et le transformer en une fibre emblématique pour le futur.

Le designer François Azambourg, a ensuite fait part de ses début avec le lin, partageant son expérience avec les matériaux composites naturels. Il s’est exprimé sur ses recherches, son point de vue sur la dimension créative et innovante du lin ainsi que les défis techniques auxquels il a dû faire face pour maîtriser cette fibre. Il a évoqué le parcours qu’il avait mené avec Frédéric Morand, l’industriel qui l’avait contacté à l’origine afin de réaliser du mobilier en matériaux composites parce qu’il possédait une usine d’équipement pour l’automobile. Un composite est un textile rigidifié par une résine qui va lui permettre de durcir. En l'occurrence, les résines que l’industriel utilisait était du polyester, de l'époxy, ce qui n’était pas satisfaisant pour François Azambourg. C’est pourquoi il l’a convaincu de s’orienter vers des résines végétales, notamment parce que les Américains commençaient à éprouver des travaux réalisés à partir de tournesol. Le designer avait perçu que le temps des composites d'origine naturelle était venu. En discutant, les deux hommes sont tombés d’accord pour avancer dans la voie du lin composite. De plus, le lin s’était révélé être la fibre naturelle de loin la plus performante !

François Azambourg cultive un intérêt à voir se développer des composites végétaux durables. En qualité de professeur de design, il éclaire ses étudiants vers un chemin plus vertueux à explorer dans le design, autant que des sujets qui l’animent comme des questions plus sociétales ou l’égalité femme-homme. Marie-Emmanuelle Belzung a rappelé qu’il y a une dizaine d’années, François Azambourg avait notamment été invité par la plus grande matériauthèque au monde, à New York, par rapport à son travail et ses recherches sur la matière, dont le lin.
Elle a ajouté à propos de ces talents créatifs : « Nous ne sommes que des passeurs, eux en sont des utilisateurs et en ont l’expérience du vécu avec des réussites et des projets qui se retrouvent dans des musées. ».

La jeune garde du Lin

Représentant la nouvelle génération de créateurs, les designeuses Marisol Santana et Emily Chakhtakhtinsky - toutes deux lauréates du Prix du Mobilier National à la Design Parade de Toulon en 2023 - ont fait part de leur expérience avec le lin. Marisol Santana a parlé d’un déclic qui lui serait venu lors de la visite des deux designeuses au Linen Dream Lab de l’Alliance à Paris.
Ensemble, elles ont évoqué leur intérêt pour les fibres durables, le recours à une production locale dans leurs créations ou encore la notion développement durable dans le design. Elles ont expliqué quel a été leur processus créatif pour la réalisation « Lou Cabanoun » qui intégrait des textiles en lin.

De manière plus personnelle, Marisol Santana a également évoqué son histoire avec le lin. Rappelant l'importance des savoir-faire et son initiation au lin transmise dans une famille vivant dans un intérieur entièrement décoré de lin ou côtoyant de nappes de lin anciennes. Une transmission du lin due à sa maman alors chef de production dans l’industrie textile qui lui a appris à aimer le lin, qui le travaillait et qui menait des expérimentations avec la matière. Elle raconte qu’il y avait plein de lin chez elle, que grâce à cette matière tout était possible.

L'ensemble des échanges a permis de mettre en lumière toute la polyvalence du lin, ses propriétés durables, autant que le potentiel d'innovation de la matière.
Le lin est une fibre que l’on retrouve dans la mode, le design, l'architecture ou encore l'aéronautique. Comme l’a énoncé Alain Camilleri lors de son intervention, c’est une fibre que l'on rencontre de manière récurrente sous différents formes dans notre quotidien, à travers divers objets et jusque dans notre vocabulaire. La permanence du lin s’étend surtout à travers toutes les périodes de l'histoire, dans certaines cultures du passé mais aussi dans nos sociétés contemporaines.
La table ronde a contribué à rappeler la présence continue du lin dans différentes cultures et industrie au cours de l'histoire. Les intervenants ont tous exprimé l’intérêt de valoriser cette fibre végétale dans l’objectif de continuer à explorer les nombreuses possibilités d'utilisation du lin à travers de nombreuses applications contemporaines.

Le Lin, fibre de civilisation(s) - ouvrage collectif sous la direction d’Alain Camilleri et Alliance for European Flax-Linen & Hemp,
336 pages,
Parution le 4 octobre 2023,
Disponible en version française dans les librairies, Fnac, Cultura, Decitre, Chapitre, Le Furet du Nord... et en ligne sur Amazon.fr, Fnac.com ou Rakuten.com.
Prix public : 39 €

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